Publié le 27 juin 2022 sous la présidence de Matthieu Poumarède
Le groupe de recherche sur la copropriété (GRECCO)[1], réunissant des praticiens et des universitaires, a pour objectif de développer une réflexion pérenne sur l’application et l’évolution du droit de la copropriété. Après débats, le GRECCO rédige des propositions destinées à faciliter l’interprétation des textes du droit de la copropriété, à suggérer des pratiques professionnelles et à susciter des modifications législatives et réglementaires. Ces propositions sont largement diffusées dans les revues juridiques et professionnelles afin qu’elles puissent être connues et discutées.
Le conseil syndical est un organe de fonctionnement de la copropriété, dont la fonction principale est d’assister et de contrôler le syndic.
L’ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019 lui a conféré de nouvelles prérogatives, qui modifient substantiellement son rôle et nécessitent de revenir sur l’obligation d’instituer un conseil syndical et son organisation.
Une seconde préconisation (n°16) précisera les modalités de mise en œuvre de ses prérogatives.
1. L’obligation d’instituer un conseil syndical.
En vertu de l’article 21, alinéa 13, de la loi du 10 juillet 1965, « l’assemblée générale peut décider par une délibération spéciale, à la majorité prévue par l’article 26, de ne pas instituer de conseil syndical. La décision contraire est prise à la majorité des voix de tous les copropriétaires ».
Cette disposition est écartée s’agissant des petites copropriétés, au sens de l’article 41-8 de la loi du 10 juillet 1965. L’article 41-9 de la loi du 10 juillet 1965, applicable aux petites copropriétés, dispose en effet que « par dérogation aux dispositions des articles 21 et 17-1, le syndicat n’est pas tenu de constituer un conseil syndical ». Si les copropriétaires ne souhaitent pas instituer de conseil syndical, ils n’ont pas à se prononcer sur cette question.
Cette dérogation à l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965 n’est pas reprise au sein de la section relative aux « Dispositions particulières aux syndicats dont le nombre de voix est réparti entre deux copropriétaires ». Les copropriétés dites « à deux » devraient donc être soumises aux dispositions de l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965 qui suppose, par défaut, l’existence d’un conseil syndical[2]. Pourtant, en pratique, un conseil syndical dans une copropriété dite « à deux » se conçoit difficilement, puisque la réunion des deux copropriétaires, même sans convocation préalable, peut constituer une assemblée délibérative.
Pour ces raisons, le régime des copropriétés dites « à deux » devrait être aligné sur ce point avec le régime des petites copropriétés.
2. L’organisation du conseil syndical.
En vertu de l’article 22 du décret du 17 mars 1967, « à moins que le règlement de copropriété n’ait fixé les règles relatives à l’organisation et au fonctionnement du conseil syndical, ces règles sont fixées ou modifiées par l’assemblée générale à la majorité de l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965 ».
En revanche, lorsque le règlement de copropriété prévoit l’organisation du conseil syndical en application de l’article 22 du décret du 17 mars 1967, il ne peut être modifié que par un vote de l’assemblée générale à la majorité de l’article 26 b) de la loi du 10 juillet 1965 [3] en vertu duquel « sont prises à la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix les décisions concernant (…) la modification, ou éventuellement l’établissement, du règlement de copropriété dans la mesure où il concerne la jouissance, l’usage et l’administration des parties communes ».
Préconisation au rédacteur du règlement de copropriété : Le rédacteur doit s’interroger sur les précisions à apporter sur la composition et l’organisation du conseil syndical en fonction de la taille ou de la complexité de la copropriété, car l’assemblée générale aura les plus grandes difficultés à les modifier par la suite (la majorité de l’article 26 b) – ou de l’article 26-1 lors d’un second scrutin – est requise)
2.1. L’élection du président du conseil syndical.
En vertu de l’article 21, alinéa 11, de la loi du 10 juillet 1965, « le conseil syndical élit son président parmi ses membres ».
L’élection du président du conseil syndical est une obligation légale. Elle est de la compétence du conseil syndical et non de l’assemblée générale des copropriétaires.
Au-delà de l’obligation légale, la désignation du président du conseil syndical est nécessaire car il exerce des fonctions spécifiques, qui ne peuvent être déléguées à un autre membre du conseil, ni à quiconque, et notamment :
– articles 15 et 25 (i) de la loi du 10 juillet 1965 : action attitrée au président du conseil syndical pour saisir le Tribunal en cas de carence ou d’inaction du syndic ;
– article 18 V de la loi du 10 juillet 1965 : convocation de l’assemblée générale en cas d’empêchement du syndic ;
– article 18 VIII de la loi du 10 juillet 1965 : fin anticipée du mandat du syndic à l’initiative du syndic ;
– article 18-2 de la loi du 10 juillet 1965 : action en référé aux fins d’obtenir la remise sous astreinte des pièces de l’ancien syndic ;
– articles 8 et 50 du décret du 17 mars 1967 : mise en demeure au syndic d’avoir à convoquer une assemblée générale ;
– dans les copropriétés en pré difficultés et difficultés, le président du conseil syndical a compétence pour déclencher les procédures.
Par ailleurs, en l’absence de désignation du président du conseil syndical, l’article 26, alinéa 4, du décret du 17 mars 1967 prévoit que la communication écrite devra être faite à chacun des membres du conseil syndical, ce qui n’est pas sans alourdir le fonctionnement.
Il résulte de ces dispositions De ces dispositions, il en résulte l’impérieuse nécessité d’élire un président du conseil syndical. A défaut, il n’est cependant prévu aucune procédure spécifique de saisine du juge pour le faire désigner.
2.2 La composition du conseil syndical.
a. Le nombre de membres du conseil syndical.
Il résulte de l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965 que le conseil syndical ne saurait être composé d’un seul membre (CA Paris, 23e chambre, 24 février 1999, JurisData n° 1999-020414). Le conseil syndical sera de préférence composé d’un nombre impair de membres.
Ce nombre peut être fixé par le règlement de copropriété, qui peut prévoir un nombre minimal et/ou maximal.
Au cet égard, au regard du faible nombre de candidatures aux fonctions de conseillers syndicaux, il est préférable que le rédacteur du règlement de copropriété ne prévoit pas le nombre minimal de membres du conseil syndical, afin de laisser l’assemblée générale statuer (cf § 2).
Lorsque le nombre minimal prévu par le règlement de copropriété n’a pas pu être atteint, le mandat des conseillers syndicaux élus n’est pas remis en cause, mais le conseil syndical n’est pas valablement constitué. S’ouvre alors la possibilité d’une désignation judiciaire des membres manquants par application de l’article 48 du décret du 17 mars 1967[4].
A l’opposé, il est pertinent de prévoir un nombre maximal pour assurer l’efficacité du conseil syndical, surtout dans une grande copropriété, avec la possibilité de désigner de membres suppléants.
Préconisation au syndic : le syndic doit vérifier dans le règlement de copropriété ou dans les procès-verbaux d’assemblée générale, le nombre de sièges de conseillers syndicaux à pourvoir.
b. Les candidatures au conseil syndical.
- Clauses du règlement de copropriété sur les candidatures.
Certains règlements de copropriété prévoient que le conseil syndical doit comporter un « représentant » de chaque bâtiment, pour favoriser la plus grande représentativité lorsqu’elle est possible (par bâtiment, mais aussi par type d’occupation).
Cette clause, bien que valable, peut poser difficulté lors de l’élection, d’une part faute de candidature et d’autre part parce qu’elle limite la liberté de candidature et de choix pour les copropriétaires.
- Candidatures au conseil syndical et vote par correspondance.
Compte tenu du vote par correspondance, avant l’envoi des convocations à l’assemblée générale, il est recommandé au syndic de solliciter des candidatures, en ce compris celles des membres du conseil syndical sortant. Le syndic peut profiter de l’affichage dans les parties communes, de la date d’assemblée générale (art. 9 du décret du 17 mars 1967) pour susciter ces candidatures, en fixant une date limite de réception.
Des candidatures peuvent être présentées le jour de l’assemblée générale. Afin d’éclairer le vote des copropriétaires qui votent par correspondance, il est souhaitable de rappeler dans la convocation que les candidatures mentionnées dans celle-ci ne sont pas exclusives de candidatures en assemblée générale.
Ces dernières candidatures ne seront soumises qu’au vote des copropriétaires présents ou représentés, les copropriétaires votant par correspondance étant considérés comme défaillants (art. 17-1 A de la loi du 10 juillet 1965,).
- Scrutin.
La désignation des membres du conseil syndical par l’assemblée générale est individuelle (art. 21 de la loi 10 juillet 1965 , art. 21).
Si la présentation de « listes » de candidats n’est prohibée par aucun texte, la liberté de choix de chaque copropriétaire implique que la désignation des membres du conseil syndical soit individuelle.
En conséquence, le Pprésident de séance fait procéder, en toute circonstance, à un vote par candidature.
Lorsque le nombre de candidats ayant obtenu la majorité requise est supérieur au nombre de membres du conseil syndical, les membres désignés sont ceux ayant obtenu le plus grand nombre de voix.
c.Les membres du conseil syndical « non-copropriétaires » (ascendant, descendant, conjoint, etc.).
L’article 21 de la loi du 10 juillet 1965 ouvre la candidature à un certain nombre de personnes qui ne sont pas nécessairement copropriétaires (conjoint, partenaire, descendant, ascendant, etc…).
Ce texte n’exige pas que ces personnes soient titulaires d’un « mandat » du copropriétaire lui-même aux termes duquel celui-ci accepte la candidature et renonce à se présenter. La simple justification de leur qualité semble suffire[5].
En l’état actuel du texte, l’accord du copropriétaire concerné, exprès ou tacite, n’est pas non plus expressément requis. La question se pose donc de savoir si une candidature spontanée d’un de ces « non-copropriétaires » est recevable. L’esprit du texte semble commander que seul le copropriétaire concerné ou son représentant puisse présenter une candidature au conseil syndical.
Point d’attention : rien n’empêche que le conseil syndical soit composé de plusieurs membres d’une même famille bien qu’une . Une telle composition peut puisse poser des difficultés liées à la représentativité, par ailleurs souhaitable.
d. La durée du mandat des membres du conseil syndical.
Les conseillers syndicaux sont élus pour une durée qui ne peut excéder trois ans renouvelables. Aucune disposition n’oblige à prévoir que la durée du mandat des conseillers syndicaux soit calquée sur la durée de mandat du syndic.
La durée du mandat doit être précisée dans la résolution ; à défaut elle est d’une durée de trois ans renouvelable, à compter de la date de leur désignation par l’assemblée générale. Cette durée peut être définie par un terme (une date calendaire) ou par une durée déterminée.
Pour éviter toute vacance du conseil syndical, il est recommandé que la durée soit en tous les cas supérieure à 12 mois, afin de s’assurer que le conseil syndical soit toujours en fonction le jour de l’assemblée générale annuelle suivante.
Si le conseil syndical n’a pas atteint le nombre maximal de membres[6], un copropriétaire peut présenter sa candidature avant l’expiration du mandat des autres membres du conseil syndical. L’assemblée générale fixe la durée de son mandat, mais il est opportun de prévoir que celui-ci prendra fin à la date d’échéance prévue pour les mandats des autres conseillers syndicaux.
e. La désignation de conseillers syndicaux suppléants (art. 25 du décret du 17 mars 1967).
A moins que le règlement de copropriété ne l’ait prévu, la désignation de membres suppléants est une simple faculté. Toutefois, cette désignation permet d’éviter que le conseil syndical soit irrégulièrement constitué, lorsque plus d’un quart des sièges devient vacant, pour quelque cause que ce soit.
[1] Le groupe de travail est composé de : Matthieu Poumarède, professeur de droit ; Denis Brachet, géomètre-expert ; Véronique Bacot-Réaume, expert judiciaire ; Patrick Baudouin, avocat ; Christelle Coutant-Lapalus, professeur de droit ; Éliane Frémeaux, notaire honoraire ; Laurence Guégan-Gélinet, avocat ; Florence Bayard-Jammes, enseignant-chercheur ; Agnès Lebatteux, avocat ; Stéphane Lelièvre, notaire ; Bernard Pérouzel, expert ; Olivier Safar, syndic de copropriété.
[2] Il pourrait en aller autrement lorsqu’une copropriété remplit les conditions tant de la section relative aux « Dispositions particulières aux syndicats dont le nombre de voix est réparti entre deux copropriétaires » que de la section relative aux « dispositions particulières aux petites copropriétés », si l’on considère que l’application des dispositions est cumulative.
[3] Sauf dans les petites copropriétés définies à l’article 41-8 de la loi, dans lesquelles le règlement de copropriété peut être mis en conformité avec les nouvelles dispositions de la loi du 10 juillet 1965 (art 41-9 de la loi qui dispense ces copropriétés de l’obligation de constituer un conseil syndical) par application de l’article 24 f, donc à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance.
[4] Civ. 3e, 17 nov. 2016, n° 15-23.027.
[5] Contra, CA Paris 26 oct. 2000 n° 2000/07252 et n° 2000-128261 ; CA Rouen, 30 mars 2005 : JurisData n° 2005-273550 ) ; églt Rép. min. n° 21593, JOAN 5 mars 1990, p. 1088.
[6] Lorsque le règlement de copropriété comporte un nombre maximal et un nombre minimal, le conseil syndical peut être régulièrement constitué, sans pour autant que le nombre maximum de membre soit atteint. Il en est de même si certains sièges deviennent vacants, mais que le seuil du quart de siège vacant n’est pas atteint.